Nucléaire, arme destructrice...

Publié le par Vert Estuaire Charentais

le 16 fevrier 2010 :  "exercices tactiques en ambiance nucléaire"
c'est toujours 50 ans apres qu'on apprend les erreurs du passé. La folie du nucléaire est pourtant toujours présente, sans qu'on connaisse encore les dégats qu'elle provoquera si on en banalise l'utilisation tant énergétique que militaire... Energie propre disent certains, ma...is qui exposent à des risques similaires ! Cet article de Libé est éloquent , et on pourrait parler longtemps également de l'impact sanitaire sur les populations du pacifique de ces essais du passé pas si lointain. :

6/02/2010 article sur le site du journal Liberation :

Essais nucléaires : Gerboise verte, la bombe et le scoop qui font plouf... (actualisé-2)

Le Parisien de ce matin titre : "Exclusif : quand les appelés du contingent servaient de cobayes..." : "Un rapport confidentiel révèle comment l'armée française a utilisé ses soldats lors des premiers essais atomiques dans le Sahara au début des années 1960". Joli scoop... mais du Nouvel Observateur en date du 5 février 1998, comme on peut le lire ici. Il y a douze ans, mon confrère Vincent Jauvert racontait déjà la même histoire, avec force détails.

L'affaire est resortie la semaine dernière, avec la publicaiton dans la revue Damoclès, éditée par l'observatoire des armes nucléaires françaises, un groupe militant antinucléaire, d'un article sur "le crime de Gerboise verte". Il s'appuie sur un "document de synthèse" de 266 pages, sans doute rédigé en 1996. Classé "confidentiel défense", on ignore qui sont les auteurs et qui en furent les destinataires.

Cet épisode est tellement secret... qu'il figure dans un dossier de presse publié par le ministère de la Défense en janvier 2007. A cette date, les autorités confirmaient que de tels "exercices tactiques en ambiance nucléaire" avaient même eu lieu à deux reprises, lors des tests Gerboise rouge (décembre 1960) et Gerboise verte (avril 1961). Il s'agissait d'"opérations impliquant une centaine de militaires" qui consistaient en des "reconnaissances d'itinéraires en milieu contaminé avec des hélicoptères guidant des blindés, des mouvements de fantassins munis de tous leurs équipements de portection ainsi que des essais de décontamination de matériels en campagne". Le ministère de la Défense assure que les doses recçues ont été "faibles", "bien en deça des doses annuelles".

Le rapport sur "la genèse et l'organisation des expérimentations du Sahara" (tome 1), dont fait état la Parisien de ce matin, revient sur l'essai Gerboise Verte, le quatrième test nucléaire réalisé par la France, en 1961. Il fut le dernier essai effectué dans l'atmosphère au Sahara.

Gerboise verte fut un échec. Installé sur une tour de 50 mètres, à Reggane, dans la Sahara alors français, l'engin était prévu pour dégager une puissance estimée entre 6 et 18 kilotonnes et sa puissance ne fut que d'environ 1 kilotonne, sans doute moins.

Le test se déroula dans des conditions politiques très particulières, puisqu'il eut lieu le 25 avril 1961, au moment du putsch des généraux en Algérie contre le pouvoir du général De Gaulle. L'essai fut réalisé dans une certaine précipipation pour éviter que la bombe atomique ne tombe entre les mains des généraux putschistes, qui auraient pu l'utiliser pour faire un chantage politique.

Gerboise verte devait être l'occasion de tester les conditions de combat tactique en ambiance nucléaire. L'exercice est baptisé Garigliano. Il s'agissait de voir comment des fantassins et des blindés pouvaient se protéger puis opérer après l'explosion. A l'époque, les doctrines militaires, notamment celles du Pacte de Varsovie, prévoyait en effet des tirs nucléaires tactiques et l'armée devait se préparer à combattre dans des zones "polluées". En la matière, la France était balbutiante.

Il y a douze ans, Vincent Jauvert expliquait comment "195 soldats", servant en Allemagne, avaient été choisis pour participer à cet exercice. L'article de Damoclès confirme le déroulement des faits.

Au moment de l'explosion, les fantassins équipés de tenues de protection, sont dans des abris qu'ils ont creusés à 3,3 kilomètres du "point zéro". Vingt minutes plus tard, ils en sortent et progressent en direction du "point zéro" où l'explosion a eu lieu. Ils progressent lentement, simulant des exercices de combat. Ils s'aarrêtent à 650 mètres du point zéro. La radioactivité est alors de 5 Roentgens par heure, ce qui est très élevé.  Des chars participent à l'exercice et s'approchent encore plus près, à moins de 300 mètres. L'exercice dure au total trois heures puis les militaires sont évacués par camions vers la décontamination, c'est-à-dire des douches.

Cette affaire pose surtout le problème du suivi médical des hommes qui ont participé l'exercice Garigliano et qui a été assez laxiste... Difficile de ne pas donner raison à Patrice Bouveret, de l'Observatoire des armes nucléaires, lorsqu'il dit au Parisien : « Que dans le contexte de l’époque, on fasse des manoeuvres, on peut en discuter. Mais que tout cela soit fait sans aucune prise en compte sociale ou médicale des hommes, c’est quasi criminel. »

Le rapport sur les essais nucléaires de l'office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technogies de 2001 fait état de "42 contaminations de la peau" parmi "les personnels du champ de tir", la dose maximale reçue étant de 42 mSv.

Paradoxalement, les militaires français ont eu, ce jour-là, une grande chance : la bombe n'a pas fonctionné comme prévu, dégageant dix fois de puissance qu'attendu.

D'autres expériences du même type ont-elles eu lieu plus tard ? C'est très improbable car Gerboise verte fut le dernier test atmosphérique au Sahara, les suivants ayant lieu en souterrain. Et dans le Pacifique, les atolls de Moruroa et de Fangataufa se prêtaient mal aux manoeuvres d'une section d'infanterie et de chars Patton.

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